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La Comtesse d'Albany
Lettres inédites de Madame
de Souza (et d'autres...)
(Le Portefeuille de la comtesse d'Albany : 1806-1824,
par Léon-G. Pélissier)
avec l'autorisation de
Les annotations
(en italique) sont de Léon-G. Pélissier ; Les
passages [entre crochets] sont dans Saint-René Taillandier
; "Néné" est le surnom que Mme de
Souza a donné à Charles de Flahaut, son fils
; les sujets concernant Charles de Flahaut sont reproduits
en rouge ; l'orthographe ancienne est respectée.
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lettre de Madame de Souza à la comtesse d'Albany
le 28 janvier 1812
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MA BONNE ET CHERE AMIE,
[Vous apprendrez
avec plaisir que mon fils est nommé aide de camp (Ch. de Flahaut,
colonel depuis Wagram, attaché à l'état-major de
Berthier, dont Madame de Souza fait, pour ce motif, si souvent l'éloge,
était déjà baron de l'Empire.) de S.M. l'Empereur.
- Je l'attends à toute minute et vous jugez de ma joie. - Oh
mon Dieu ! que je serai heureuse que le premier repas qu'il prendra
chez moi fût avec vous et à un de ces petits dîners
que vous aimiés. Voilà une bien belle place qui excitera
bien des jalousies ; notre enfant aura à se faire pardonner son
succès par les envieux, et à le méritter vis à vis de l'empereur. Au reste, tout le monde dit du bien de lui, et vraiment
il s'est fait estimer et aimer dans cette campagne. - Il est tout mon
bonheur.]
[Mais quand donc nous reviendrez-vous
? On parle (c'est-à-dire Paris) du départ de l'empereur
au mois de mars : (Napoléon alla tenir la cour à
Dresde en avril. L'invasion de la Russie ne commença que le 23
juin.) vous ne serez sûrement pas ici, mais au moins y
viendrez-vous pour que je vous donne mes premières roses.] (Madame
d'Arberg, dans la cour plutôt légère et quelque
peu désordonnée de la Malmaison, paraît avoir apporté
la dignité un peu revêche d'une chanoinesse, et avoir pris
fort au sérieux son rôle assez ingrat de camarera mayor.
Les divers traits que cite d'elle Madame de Souza n'infirment pas cette
opinion.)
Que j'aimerais à me sentir appuyée sur vous dans cette seconde campagne.
Je n'ai plus de force ni pour la joie ni pour la peine, car je suis
malade d'être heureuse et de penser que je vais revoir ce bon,
cet excellent enfant. J'ai un de mes gros rhume et je puis à peine respirer. Mme d'Arberg m'a témoigné une joie
de l'avancement de mon fils qui la fait venir me voir, ce qui est énorme, car elle ne sort jamais,
et vraiment j'ai retrouvé sur sa figure ce rire doux et bon de
ma chère amie.
Le général Kleine
est très heureux d'avoir un garçon.. On dit la comtesse
de Leobo un peu souffreteuse, ce qui annoncerait presqu'un commencement
de grossesse. Voilà, ma très bonne amie, toutes les nouvelles
de votre famille.
Mon pauvre neveu Capellis (Je
n'ai aucun renseignement sur ce personnage) est mort presque
subitement : cela m'a fait une véritable peine. Papa (Son
mari, M de Souza-Botelho. Elle le nomme ainsi familièrement dans
ses lettres à Madame d'Albany jusqu'en 1814. Après sa
brouille ou du moins son refroidissement avec son amie, elle l'appellera
en plus grande cérémonie mon mari.) est plus triste
que jamais ; c'est une vraie gravure à la manière noire
; cela m'afflige, me tourmente, a détruit toute ma gaieté.
Je ne suis plus la même sous aucuns rapports. Je n'ai plus cette
disposition à croire au bonheur qui faisait dire à M de
Montesquiou (Le marquis de Montesquiou Fazonsac qui avait été
son hôte pendant l'émigration, en 1793, à Bremgarten
en Argovie.) : "Vous avés un caractère qui
tuera plus de malleurs que la fortune ne peut vous en donner."
Je suis triste, ma chère amie, et je me traîne avec peine
dans cette vie si courte dont les jours sont si longs.
Mille complimens à M Fabre
; c'est à cette heure qu'il faut qu'il me fasse un beau portrait du général
Néné. J'ai reçu de Naples (Il s'agit probablement
ici d'un cadeau de la reine Caroline Murat.) un portrait du
Tasse par Castelli ; c'est d'une belle couleur, d'une grande expression.
Il voudra bien me dire si c'est précieux.
[Adieu encore, ma bonne, ma chère
amie, je vous aimerai jusqu'à ma dernière heure. Dites-moi
quand vous reviendrés. La casa vous offre mille hommages. Votre
souvenir nous est aussi vif que lorsque vous étiez présente,
soyez-en bien sûre.]
[Le portefeuille de Mme d'Albany]
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