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La Comtesse d'Albany
Lettres inédites de Madame
de Souza (et d'autres...)
(Le Portefeuille de la comtesse d'Albany : 1806-1824,
par Léon-G. Pélissier)
avec l'autorisation de
Les annotations
(en italique) sont de Léon-G. Pélissier ; Les
passages [entre crochets] sont dans Saint-René Taillandier
; "Néné" est le surnom que Mme de
Souza a donné à Charles de Flahaut, son fils
; les sujets concernant Charles de Flahaut sont reproduits
en rouge ; l'orthographe ancienne est respectée.
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lettre de Madame de Souza à la comtesse d'Albany
Paris, le 7 septembre 1814
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Je n'ai reçu
qu'hier votre lettre du 26, ma bien chère amie. Je vous dirai
d'abord que le comte de Lobeau a dîné chez moi, hier et
m'a parlé avec la plus sincère reconnoissance de la bonté
avec laquelle vous lui aaviez envoyé de l'argent lorsqu'il était
prisonnier. (Le général Lobau, fait prisonnier pendant
la seconde campagne de 1813, avait été envoyé en
captivité en Hongrie.) Il m'a dt qu'il ne l'oublerait
jamais, et de là, nous avons parlé de vous, de votre bonne
tête, de votre excellent coeur ; enfin j'aurais voulu que vous
fussiés dans un coin pour nous entendre. Vous auriés été
contente. Ne doit-on pas l'être quand on est si bien appréciée
et si véritablement aimée par de bonnes gens ? - Votre
soeur (Madame d'Arberg) est logée chez lui à
présent. J'en suis très aise, cela la tire de la solitude,
et elle en avait besoin, surtout en sortant de Malmaison où elle
étoit toujours si entourée. C'est souvent un grand ennui,
mais toujours une distraction. Mme Klein y va comme à l'ordinaire.
Ainsi je suppose que les arrangemens de famille se termineront à
l'amiable ; mais je l'ignore, car je ne me suis jamais permis de parler
de cela. Oui, ma très chère amie, tout ce qui vous appartient
aura toujours des droits sur mon coeur, sera toujours soigné par moi ; et avec votre nom, je ferais bien du chemin.
Je trouves bien
quelques choses à dire sur le Pape, qui confisque les biens de
tout franc-maçon. La part donnée aux dénonciateurs
était chose déjà usitée, mais celle accordée
aux juges méritte un brevet d'invention. Ce n'est sûrement
pas votre cardinal qui a conseillé cela.
M G... a toujours été bien pour moi, et je dirois mieux que jamais. Je crois
que Bertrand commence à être aux regrets de sa conduite.
Que ne donnerais-je pour pouvoir l'oublier et qu'il l'oubliât
aussi.
Mais ces nobles
caractères, ces fiers courages, dont je suis entourée,
ne pardonneroient pas à ma faiblesse, s'ils le retrouvoient à
sa place accoutumée dans ma chambre. Entre nous soit dit, je
l'y reverrois avec plaisir. L'amitié se compose d'indulgence
: je sais que le moment qu'il a choisi pour m'abbandonner laisse peu
d'excuse : mais cette habitude de vingt-huit ans a laissé de
grande racine dans mon coeur. [Je voudrois bien lui dicter la lettre
qu'il devroit écrire. Son amour-propre pourroit se fier à
moy] cela même, ma chère, je ne le dis qu'à vous.
Pour l'Ancien, (Talleyrand) je n'en ai pas
entendu parler : mais cette playe est guérie depuis si longtems
que cela ne m'a ni étonnée ni fâchée. Il
reviendra ou continuera à m'oublier, sans me faire ni plaisir
ni peine. La voisinne a été bien pour moi,
mais très mal pour Néné. Elle ne peut cependant
avoir à lui reprocher que de n'être pas mort à la
place de son ancien camarade. C'est là l'unique tort qu'il peut
avoir eu envers elle. Je crois cependant que ce camarade
a bien fait de mourir et qu'il auroit été fort mal vu
ici. Adieu, ma bonne, mon excellente amie ; avés-vous reçu
une lettre de moi que je vous ai envoyée par une occasion qui
ne devoit pas s'arrêter à Florence, mais bien y laisser
ma lettre ? Mandés-moi si M Filangieri y a passé ce mois
dernier, retournant de Paris chez lui.
Je vous aime de
toute toute (sic) mon âme, mon excellente amie, et je désire
bien vous revoir. Mille et mille complimens à M Fabre. Je suis
bien aise qu'il soit guéri, et je vous envie bien le beau tableau
qu'il a donné à ma chère Louise, que j'ai aussi
fêté de coeur ici, en buvant à sa santé dans
la casa.
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