Madame de Souza
à Margaret Mercer Elphinstone, Countess of Flahaut, sa belle-fille
et à son fils Charles de Flahaut
6 novembre 1817

J'ai reçu ta lettre où tu m'annonces l'état de ma fille, que j'en suis heureuse ! Qu'elle se ménage bien car toute la santé du reste de la vie dépend de cette première grossesse. Mon Dieu que je suis contente de ma dignité de grand' mère et comme j'aimerai mon petit. Ma place sera de le bien gâter, de bien l'aimer. Toutes les rigueurs de l'éducation vous regarderont, monsieur et madame, moi je n'aurai qu'à sourire et caresser. C'est une jolie place que celle de grand' mère !
Quant aux dispositions de lord K. elles sont déjà meilleures, et avec le temps elles redeviendront tout à fait bonnes quant aux revenus, voilà ce que je crois, s'il vit. Du reste je ne veux pas y penser, et je n'en parle jamais
Lady Holland a dit à M. Gal. qu'elle avait reçu une lettre de Londres qui lui annonçait la grossesse de ta femme, et qu'elle avait donné l'ordre à Londres de lui louer une maison pour le mois de Mars afin d'y faire ses couches. Tu me donnes comme cela des secrets à garder, que tout le monde sait, et j'ai l'air d'une bête lorsqu'on m'en fait compliment.
As-tu reçu le Camoëns ?
Je joins ici les rapports de l'Institut. Tu n'as pas d'idée comme on trouve cet ouvrage beau, et comme on admire ici la générosité de papa. . Lis le dernier alinéa de l'avertissement.
Actuellement, je parle à ma fille.
Que je suis heureuse ma chère fille de la bonne nouvelle que mon fils m'a annoncée. Ah ! Croyez-moi, que le plus grand bonheur est d'être mère, et sûrement le fils de mon Charles rendra la sienne heureuse, ce sera le meilleur des fils !
J'irai certainement en Angleterre pour ce bien heureux moment et vous soigner comme la garde la plus affectueuse et la plus assidue. Avez-vous reçu vos souliers ? Est-ce ceux de la mesure ? En voulez-vous d'autres ?
Adieu ma chère fille, je ne puis écrire beaucoup parce que je me suis donné un effort au bras ce qui ne sera rien du tout mais me fait assez souffrir en écrivant. Veuillez le dire à lady Grey, c'est pour cela que je ne réponds pas à sa très aimable lettre. J'ai aussi reçu celle de M. Frecki, mais je lui répondrai la semaine prochaine.
Nonore a été acquittée à Lyon le 2 à 10h du soir , mais après 8 séances publiques de 6 heures chacune devant la cour prévotale. La pauvre enfant a bien souffert. Elle n'était accusée que de non-révélation et le procureur du Roi avait conclu à 5 ans de prison et deux mille francs d'amende pour avoir reçu une lettre imprudente ; elle se trouvait placée (pour ne l'avoir pas révélée) entre l'infâmie si elle la dénonçait ou la prison ; enfin après 5 mois de souffrance, la voilà acquittée.
Adieu encore, ma chère fille, ma bien aimée fille, mon coeur vous bénit et je vous aime comme mère, comme grand' mère enfin je vous aime avec tous les sentiments qui donnent du prix à la vie.
Mais je ne puis plus écrire.
Mon mari est dans la joie de son âme, d'être aussi grand' père.
Il y a ici un neveu du duc d'Athol qui dit mille biens de Charles.
Aimez-moi, ma chère fille et je n'aurais rien de plus à demander à Dieu.
Mille compliments à lord et lady Grey.
Je vous embrasse et mon Charles de toutes les forces de mon âme.

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dernière modification : 26 décembre 2019
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