13 novembre 1869
Lettre d'E. Ollivier (Corps législatif)

Sire,

Je continue à vous communiquer le résultat de mes réflexionx quotidiennes.
J'ai prié M. Daru de se trouver chez lui mercredi à cinq heures et demie.
Si j'échouai auprès de lui malgré tous les efforts que je tenterai, Votre Majesté veut-elle me permettre d'offrir le portefeuille du Commerce à M. Buffet ? Je connais, mieux encore que vous, Sire, les inconvénients de ce personnage ; mais il a fait avec nous la loi sur les coalitions, il n'est pas protectionniste, il parle bien, est honnête et jouit d'une réelle influence sur une partie de l'opinion ; quant à ses inconvénients, j'en fait mon affaire et je m'ingénierai à en défendre Votre Majesté. Si cependant, Sire, vous ne pouviez vous résigner à M. Buffet, ce que je regretterais, je vous prierais de m'autoriser à m'adresser à M. Segris. Je voudrais ne vous entourer que de personnes qui vous fussent agréables, mais nous sommes à l'entrée d'un défilé difficile et nous ne le franchirons qu'en prenant un peu sur nous. Après la session, si, comme je l'espère, nos jeunes recrues se sont bien conduites au feu, vous pourrez arranger tout cela autrement, de manière à ne vous imposer le sacrifice d'aucune répugnance personnelle.
Est-ce que Piétri n'aurait pas l'étoffe d'un ministre de l'Intérieur ? Je m'en accomoderais fort bien.
Si Chasseloup se trouve trop démuni au ministère des Beaux-Arts, on pourrait le mettre aux Travaux publics, où un orateur n'est pas indispensable, et l'on placerait Talhouët aux Beaux-Arts.
Il y aurait encore une autre combinaison, ce serait de redonner à Chasseloup son ancien ministère de la Marine. Vous auriez ainsi un portefeuille de plus pour un homme nouveau, M. Mège, par exemple, qui parle bien, et qui jouit de beaucoup de considération.
Enfin on pourrait placer Chasseloup à l'Intérieur avec Duvernois, jusqu'au jour où le sous-secrétaire d'Etat deviendrait ministre.
Je ne puis plus recevoir ici utilement de lettres de Votre Majesté. Je vous prie de vouloir bien me faire connaître vos intentions sur les projets que je vous ai soumis, mardi soir, à Paris, afin que je puisse me mettre à l'oeuvre dès le lendemain et tout terminer le plus tôt possible.
Je prépare une circulaire aux procureurs généraux sur la presse, afin de mettre un peu d'ordre dans l'anarchie qui règne actuellement sur cette matière.
Je vous prie d'agréer, Sire, la nouvelle assurance de mon entier dévouement.

E. Ollivier

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dernière modification : 26 décembre 2019
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