Paris, le 16 août 1863
Lettre de M. de Parieu à Napoléon

Sire,

Nous avons dîné hier au ministère des affaires étrangères et bu loyalement à votre santé, si précieuse à la France.
Rentré chez moi et seul, j'ai beaucoup pensé à la marche des affaires de l'Empire depuis 1859, époques des dernières observations écrites que je me suis permis de vous soumettre sur un système qui me paraissait alors à son début. Oserai-je vous soumettre mes réfllexions ?
Que de pas faits dans la voie de la décomposition du capitaln d'autorité depuis 1860, et presque toujours quand on pouvait ajourner ou refuser !
Qui obligeait, il y a pau de mois, à déclarer à la Chambre que les maires seraient choisis, autant que possible, dans les conseils municipaux ? Pourquoi pas un langage plus restrictif, plus prudent ?
Et maintenant, qui empêcherait encore de sauvegarder le principe par quelques maintiens de magistrats utiles sur les points où ils ont succombé à des hostilités politiques évidentes ? Comment démanteler un article de la Constitution sans un coup de canon, même à poudre, tiré pour sa défense ?
Sans ambition personnelle, tenant un peu, comme l'empereur romain, la cour pour marâtre et la philosophie pour mère, je ne puis m'empêcher , dans l'intérêt de la stabilité des institutions du pays et dans celui de Votre Majesté, de vous communiquer cette réflexion au moment d'aller me reposer dans mes montagnes en lisant Machiavel, Montesquieu, Tocqueville, et souhaitant sincèrement à Votre Majesté de réaliser dans sa politique intérieure cette prudence qui me paraît exister dans sa politique extérieure, au moins depuis plusieurs années.
Je crois n'être ni un fanfaron, ni un dédaigneux, ni un homme stupidement chagrin.
Je vois partout brasser des affaires autour de vous.
On vous comblerait de projets de détail, spirituellement exposés.
Où sont le conseil, le système, les vues politiques ?
Je pris Votre Majesté de m'excuser, après cinq ans de travail aux affaires, de lui communiquer ces appréhensions, ces aperçus, ces respectueuses observations politiques.
Votre Majesté voudra bien daigner y voir la preuve des sentiments de dévouement avec lesquels j'ai l'honneur d'être, avec respect profond, son très-humble et obéissant serviteur et didèle sujet.

E. de Parieu

Au crayon, en marge : "l'Empereur acceptera"

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dernière modification : 26 décembre 2019
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