non datée
note de l'Empereur sur les affaires d'Espagne

Autographe

La révolution d'Espagne s'est faite au cri d' : "A bas les Bourbons !" et cependant il y a un parti à Madrid qui, ayant reçu de fortes sommes du duc de Montpensier, travaille à le faire arriver au trône. Nous avons un profond respect pour les décisions de la volonté nationale, et, si le duc de Montpensier es régulièrement élu par la nation espagnole, nous n'aurons rien à dire. Mais avant que cet événement se produise, si toutefois il doit avoir lieu, nous tenons à dire notre opinion. Si la nation espagnole ne veut plus de Bourbon, tant mieux ; mais si elle revient sur sa première impression, il me semble qu'elle ne pourrait pas faire un plus mauvais choix que d'élever sur le trône un Orléans, répétant en Espagne l'usurpation de 1850, et donnant à l'Europe le funeste exemple d'une soeur détrônant sa soeur. D'ailleurs, la situation de l'Espagne, dans ce moment, ne nous semble pas faite pour admettre le choix d'un prince ayant déjà des antécédents accentués et des opinions faites. Si l'Espagne pouvait supporter l'état républicain sans courir le risque de voir son unité nationale compromise par la reconstitution de royaumes indépendants, c'est ce qu'elle aurait de mieux à faire ; car cela donnerait le temps à la nation de faire son éducation politique et d'apprendre à se connaître elle-même ; mais, puisque la république n'est pas possible, tout ce qui en rappeoche le plus nous semble ce qu'il y aurait de plus profitable. Or le hasard a voulu qu'il y eût un jeune prince, le prince des Asturies, sur la tête duquel reposent tous les droits monarchiques. Il est d'un âge où ses opinions personnelles ne peuvent pas compter, et peut être élevé dans les opinions du jour, loin des flatteurs et des intrigues. Son âge permet une régence, qui serait probablement exercée par les hommes qui ont donné le plus de gages à la révolution. Et ce régime ressemblerait fort, pendant sept ou huit ans, à une république, où les agents pourraient être changés par le vote des cortès, et le prince des Asturies ne serait que l'enfant chargé d'occuper un poste auquel aucun ambitieux ne peut prétendre.

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dernière modification : 26 décembre 2019
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