Lettres d'Adélaïde de Souza à Charles de Flahaut, son fils
(CHAN 565 AP 9)
28 décembre 1815

Nous venons de faire une folie pour toi . Il est possible que tu aies envie de donner une petite marque de souvenir où tu es , j'ai trouvé une coupe de porcelaine chez Dagatti qui a coûté 3000 f. et que la personne à qui elle avait été donnée laisse pour 300 napoléons parce qu'il y a dessus, en médaillon, l'emp... et toute la famille. C'est d'abord superbe, et puis c'est charmant, sans compter que cela deviendra historique, je te l'enverrai par la première occasion, car papa en a été si frappé qu'il a fait courir Manuel pour porter les 15 napoléons de peur de manquer cette affaire. J'ai donné en étrenne à lord W... le petit cabaret de porcelaine que j'avais, où est la petite femme grosse, l'enfant qui riait, démarche, fait l'exercice, et revient de l'armée général , et est encore reçu par sa mère . Il m'en a paru ravi.
Ainsi voilà mon souvenir aux enfants, donné par père et mère. Ta caisse de fusils n'était point partie, je la garderai.
Point de nouvelles ici, si ce n'est que vus les amendements que la Chambre a mis à la loi d'amnistie, le Roi la gardera sur son bureau sans la sanctionner, laissera les Chambres passer le budget et ensuite renverra les députés chacun chez eux ; puis donnera sa loi d'amnistie en ordonnance royale. Bien simple alors qui s'y fera car les Chambres poussent toujours à leur rentrée revenir à une proposition de loi sur ceux que les princes voudraient atteindre.
Il y a un officier anglais qui a battu hier dans la rue le duc de B. qui l'avait insulté . Je ne sais pas ce qui en sera, mais je crois que ce duc fera comme l'homme qui avait reçu un soufflet ; l'on demandait à Mlle A... ce qui en était arrivé : Hélas ! dit-elle, il en a la joue enflée !
Quand j'ai vu toutes ces couronnes et toutes ces jolies femmes sur ta coupe, mon coeur s'est brisé. Pauvre petite, réduite à Constance à réclamer la protection du premier paysan Suisse !..
Adieu, cher ami de mon âme, encore bonne année, nous ne la passerons pas sans nous revoir. Si tu ne viens pas, j'irai te chercher là où tu seras. Ta terre est ma terre, tes dieux sont mes dieux.
Dominique est arrivé à Calais, il ne veut pas venir ici, je crois qu'il a peur du mauvais air de notre maison. Il se bonifie tous les jours cependant car les étrangers nous préfèrent à la déraison, à l'ingratitude qu'ils trouvent dans les purs.
Je t'aime de toute mon âme.

"Je vois avec bien de plaisir que vous vous trouviez aussi bien en Angleterre et nous sommes tous bien contents de voir que tout le monde vous y aime et vous y gâte. C'est faire l'éloge des gens qui vous connaissent que de voir qu'ils savent si bien vous apprécier. Adieu, nous pensons toujours à vous et faisons bien des voeux pour une meilleure année pour vous. Je ne puis assez vous dire combien j'ai été sensible aux expressions amicales de votre aimable lettre"
Auguste

Tes lettres m'arrivent fort exactement par Fromentel, mais quand tu sauras que le duc de Wellington quitte Paris, adresse tes lettres pour moi à M. Stuart sous l'enveloppe de lord Kinnaird. Je t'embrasse encore. Kinnaird fait venir toutes ses lettres sous l'enveloppe de M. Stuart. Ecris-moi souvent, tes lettres sont ma seule consolation."

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dernière modification : 26 décembre 2019
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