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Mémoires de la comtesse Potocka
- La comtesse Potocka fut une maîtresse supposée de Charles de Flahaut -
(voir page sur les liaisons de Charles de Flahaut)

revue des Etudes historiques (1911)
revue des Questions historiques (1897)
l'Année littéraire (1888)
avec l'aide de


 
   
Mémoires de la comtesse Potocka (1794-1820), publiés par Casimir Stryienski. Paris, Plon et Nourrit, 1897, in-8 de XXXI-424 p. avec un portrait en héliogravure et un fac-similé d'autographe.
"Encore des Mémoires qui nous arrivent de Pologne, comme ceux de la princesse Hélène Massalka, ils sont pleins de charme et d'humour : ces grandes Polonaises étaient bien les Françaises de l'Europe orientale. La comtesse Potocka, qui a laissé les souvenirs aujourd'hui publiés, était la petite-nièce du dernier roi de Pologne, Stanislas Poniatowski. C'était une patriote ardente, qui a longtemps espéré, longtemps cru possible la résurrection de la Pologne. De là son admiration passionnée pour le grand conquérant en qui la malheureuse nation démembrée avait mis sa confiance et qu'elle a servi jusqu'au bout avec un inaltérable dévouement. Malheureusement, si Napoléon eut un instant la pensée de faire revivre un peuple héroïque, il n'osa pas, entraîné par les calculs de sa politique, mettre cette pensée à exécution.

Il séjourna du moins en Pologne un certain temps, réveilla les aspirations légitimes des Polonais, et surexcita leurs espérances en leur donnant un semblant de vie et de gouvernement. C'est là aussi qu'il eut le roman le plus persistant et le plus touchant de sa vie, du moins de la part de celle qui en fut l'héroïne et dont l'attachement ne se démentit pas. Ses lieutenants s'efforçaient de marcher sur ses traces ; mais ils y mettaient plus de brutalité et de fatuité, témoin l'aventure, si gaiement racontée dans ce volume, où la comtesse Potocka remit à sa place avec une spirituelle dignité le propre beau-frère du grand empereur.
Ce n'est pas seulement à Varsovie, d'ailleurs, que la comtesse fit sa cour à Napoléon ; ce fut aussi à Paris, où elle fit un assez long séjour en 1810. L'empereur fut pour elle bienveillant et plein de galanterie, mais elle n'avait pas la même sympathie pour sa compagne, l'archiduchesse Marie-Louise ; elle relève à chaque instant son inintelligence et ses gaucheries, et ne dissimule guère ses regrets du divorce de Joséphine. Néanmoins, quand elle quitta Paris, elle était encore pleine d'admiration pour le grand homme et de confiance en son étoile. La confiance persista quand elle le vit traverser la Pologne pour la désastreuse campagne de Russie.
Malheureusement la désillusion vint vite ; à quelques mois de là, Napoléon repassait à Varsovie, mais en fugitif, ayant abandonné son armée, que les saisons avaient décimée plus que les balles. Puis venait la campagne d'Allemagne et Leipzig complétait Moscou, puis la campagne de France et l'île d'Elbe, puis les Cent-jours et Sainte-Hélène. La Pologne était morte et bien morte. Napoléon eût-il pu la faire revivre ? C'est bien douteux, il était trop loin et la Russie trop près. Alexandre en eut un moment la pensée, mais son frère, qu'il avait pris comme l'instrument de cette pensée, n'avait pas la même foi que lui et la même largeur de vues ; il ne fut qu'en apparence, dit l'auteur, le gardien des libertés constitutionnelles accordées au pays, et le rêve d'une Pologne indépendante s'évanouit encore une fois.
L'ardente patriote qu'était la comtesse Potocka brisa sa plume quand elle eut perdu tout espoir, et, quoiqu'elle eût vécu jusqu'en 1863, le livre s'arrête en 1820. "Les malheurs sans cesse croissants du pays, écrit-elle, et mes chagrins personnels m'ont ôté non seulement le désir, mais encore la faculté de m'occuper de mes souvenirs." Sentiment profondément respectable, mais que nous ne pouvons nous empêcher de regretter, car, à en juger par ce que nous avons sous les yeux, la suite de ces Mémoires nous eût apporté tout un contingent d'observations fines et de piquantes révélations.

(article de M. de la Rocheterie.)


 
   
Les Mémoires de la comtesse Potocka étaient dignes de l'impression. Anne Tyszkiewicz est polonaise : elle décrit avec un sentiment d'horreur le massacre de Praga ; elle assiste avec exaltation à la distribution des drapeaux aux trois légions Polonaises ; elle raconte avec une profonde émotion les adieux que lui fit Joseph Poniatowski ; elle aime la Pologne d'autant plus que la Pologne est opprimée et a droit à l'affection de ses enfants ; mais son patriotisme ne l'aveugle pas : elle loue son grand-oncle, le dernier roi, Stanislas-Auguste, mais ajoute que "la nature si prodigue envers l'homme privé avait refusé au monarque ce qui seul fait régner, la force et la volonté" ; elle reconnaît les qualités de ses compatriotes, mais ne se dissimule pas leur forfanterie et leur vanité. Après la Pologne, la France est son pays de prédilection. Elle voudrait renaître Française. Mais elle ne sépare pas la France de Napoléon. Bien que l'empereur n'ait pas rendu l'indépendance à la Pologne, bien qu'il n'ait pas mis Poniatowski sur le trône, elle l'admire, elle lui voue un culte passionné, elle éprouve, lorsqu'elle le voit pour la première fois, une sorte de stupeur comme à l'aspect d'un prodige, et il lui semble avoir une auréole.

Elle est femme : elle narre d'une façon charmante comment elle veut un soir que son mari l'aime en plein air, au clair de lune ; elle ne cache pas qu'elle fut éprise de Charles de Flahaut, cet homme séduisant, ce héros de roman et preux chevalier, et, si elle n'a pas succombé, c'est que Charles s'attache alors et sacrifie sa liberté à une mystérieuse française, qui lui était depuis longtemps dévouée. (Cf. p.269 ; mais l'éditeur pouvait nous dire que cette Française était la reine Hortense qui eut de Flahaut un fils, le fameux Morny, né le 21 octobre 1811.) (On a écrit p.94 et ailleurs le nom de Kalkreuth Kalkreyter ; - pourquoi imprimer F... et non en toutes lettres Flahaut, puisque l'auteur dit que sa mère était Mme de Souza ?)
Elle aime les arts : elle avait appris à les aimer dans la galerie de Willanow ; elle visite à Paris l'atelier de David, de Girodet, de Gérard, ainsi que le petit musée particulier du galant Denon et, à propos des portraits de Gérard, elle dit qu'"un peintre habile doit faire en sorte que ses portraits soient des tableaux." Elle a une grande culture littéraire : L'Iliade fut dès son enfance son livre de chevet ; une citation de la Nouvelle Héloïse dans le Génie du christianisme lui fit lire le roman de Rousseau ; elle dévora Corinne dans l'exemplaire de Napoléon. Le français dont elle se sert est vif, hardi, personnel. Les personnages qu'elle nous présente sont vivants : sa tante, Mme de Cracovie, veuve du célèbre Branicki et châtelaine du superbe Bialystok - les anecdotes qu'elle tenait de son père Poniatowski sur Charles XII sont curieuses - ; les émigrés Bassompierre, hobereaux prétentieux ; la princesse Borghèse aux formes admirables "trop souvent admirées" et son insignifiant mari ; Murat qui n'a de beau que son panache et qui fait à la comtesse une cour inutile : Narbonne, qui doit être son mentor et qui vient, tout fardé et "vieux Céladon", la surprendre au bain ! ; Davout qui raffole de Polonaises et vit à Savigny, dans un "abandon un peu soldatesque" ; la sévère maréchale Davout "qui ne perd jamais de vue le maréchalat, Junon d'Homère, femme forte qui ne devait rire qu'au dernier jour" ; le bon Maret, homme de tact et de jugement ; Bignon qui cache de grands talents sous une enveloppe bourgeoise et vulgaire, le prince de Ligne qui porte si gaiement sa pauvreté ; Mme de Souza qui soigne ses phrases et s'occupe excessivement d'elle-même ; Mme Walewska, jolie comme un Greuze et qui joint à sa beauté l'attitude et la situation commode d'une jeune veuve ; le tsar Alexandre, serré dans son uniforme et si raide qu'il a plutôt l'air d'un officier que d'un souverain ; le grans duc Constantin à la fois sauvage et pusillanime ; Mme Zajonchek "moitié ministre, moitié Ninon, moins la publicité" ; le généreux Adam Czartoryski ; le grotesque évêque de Pradt ; Marie-Louise au visage de bois et aux gros yeux de porcelaine. M. Casimir Stryenski, l'éditeur de ces Mémoires, s'est très bien acquitté de sa tâche. Son introduction offre une analyse spirituelle et fine de l'ouvrage. Il a du reste connu la comtesse et il la représente telle qu'elle fut dans sa fière et enthousiaste jeunesse, comme dans sa vieillesse résignée et doucement mélancolique. Les notes, sobres, instructives, témoignent d'une grande connaissance des choses de Pologne et de l'histoire du premier Empire.

(article de A. Chuquet)


 
 

 Histoire d'une grande dame au XVIIIè siècle ; la comtesse Hélène Potocka, par M. Lucien Perey (Calman-Lévy)

La "grande dame" dont il s'agit, dans le nouveau travail de M. Lucien Pérey (nous avons déjà respecté ce pseudonyme masculin), c'est cette jolie princesse Hélène Massalka, dont le journal de pensionaire avait servi, l'an dernier, à cet érudit aimable pour montrer de près ce qu'était l'éducation d'une fille noble au dix-huitième siècle.
Dans la seconde partie de cette étude, les souvenirs innocents de l'Abbaye-aux-Bois sont loin déjà. La destinée capricieuse a fait son oeuvre. Hélène Massalka, mariée toute jeune au prince de Ligne, ce type séduisant de grand seigneur, soldat et lettré, a reconquis sa liberté, s'est jetée dans d'étranges aventures, emportée par ce qu'on appellerait aujourd'hui un tempérament singulièrement passionné. Retournée dans son pays, en Pologne, auprès de son oncle, le prince-évêque de Wilna, - qui devait périr d'une mort tragique, pendu par le peuple soulevé à l'approche des Russes, -


Hélène de Ligne s'était éprise du comte Potocki et s'était unie à lui par un mariage au moins prématuré, car le comte était déjà marié.
L'histoire devient dès lors du vrai roman. Il faut obtenir le consentement de la comtesse Anna, l'épouse répudiée, à un divorce, qui n'était pas d'ailleurs pour étonner la société polonaise, ni la cour papale, qui avait à l'accorder, car, à ce qu'attestent les documents du temps, on divorçait furieusement, en Pologne. Mais la comtesse Anna adorait Vincent Potocki, tout autant qu'Hélène l'adorait elle-même, encore que cet heureux comte ne fût pas un homme très supérieur. Elle ne se résignait point aisément à le perdre, alors même qu'il avait déjà deux enfants d'Hélène. Les lettres de celle-ci, retrouvées par M. Lucien Pérey, montrent une période de craintes, d'espérances, d'abattements subits. Quel effroi pour celle qui n'est encore, au vrai, que la maîtresse du comte, si son amour ne reçoit point une consécration légitime ! Le comte Vincent et Hélène, s'ils sont le moins du monde séparés, s'écrivent des billets brûlants, jaloux, inquiets. Enfin, leur mariage est reconnu. Mais la jalousie d'Hélène, du moins, n'a pas lieu de cesser. Devenu un mari sérieux, le comte trompe sa femme, sans prendre même beaucoup de précautions pour dissimuler ses torts. C'est le beau-père d'Hélène, ce charmant prince de Ligne, qui aurait pourtant sujet de lui garder rancune, mais qui ne sait être qu'indulgent aux caprices d'une aussi jolie femme, qui prend parfois la peine de la raccommoder avec le comte. Pour essayer de retenir celui-ci, Hélène imagine des projets assez singuliers : elle veut marier la fille née avec le fils de Vincent Potocki, et, là encore, le vieux prince de Ligne seconde Hélène. cette indulgence dans les affaires de coeur est caractéristique, à cette époque. Une philosophie bienveillante excuse tout.
Les années se passent, cependant. Hélène revient, après les orages de la Révolution, dans ce Paris où elle a été élevée. De ses compagnes du couvent, combien existent encore ? Sa chère amie d'enfance, la petite de Stainville, est morte sur l'échafaud, et s'est mis du rouge avant de monter dans la charrette fatale, "afin, a-t-elle dit héroïquement, que la mort ne la puisse faire pâlir". Mais les fêtes de la société nouvelle arrachent vite Hélène à ces souvenirs tragiques. C'est alors que ses lettres présentent un intérêt historique général, dans les détails qu'elle donne sur le monde de la noblesse peu à peu ralliée à l'empire, et qui déjà ne boude plus, n'osant plus croire à un autre avenir, au milieu des victoires de Napoléon. Hélène Potocka donne même un portrait de l'empereur, qui prouve qu'elle subit aussi l'ascendant de sa gloire : "Il n'est pas grand, dit-elle, mais je lui ai trouvé de la dignité dans le maintien et dans la démarche. Il est gros, mais on voit que ce n'est pas de la graisse : ce sont des membres nerveux et ramassés qui donnent plutôt l'idée de la force que de l'embonpoint. Je viens à la tête : Oh ! pour cela, on ne peut lui disputer un grand caractère, prononcé en tout genre. Rappelle-toi toutes les actions se sa vie : tu les y verras peintes. Sa physionomie passe de l'expression la plus sombre à la douceur la plus angélique. Son sourire est un ciel orageux qui s'éclaircit." Il est vrai que, plus tard, elle ne portera pas un jugement moins enthousiaste de Louis XVIII. Au fond, la politique se résume pour elle aux hommages qu'elle reçoit. Si ces mémoires d'une jolie femme sont curieux, c'est surtout par la peinture qu'elle fait de la société de son temps, et c'est à ce titre qu'ils valaient la peine d'être recueillis. Les anecdotes piquantes ne manquent point. On ne se souvient de cette scène d'une féerie, où chacun voulant aller voir une fête, la garde d'un palais, de grade en grade, finit par être laissée à un chien. Une aventure à peu près semblable se passa la veille de l'entrée de Louis XVIII à Paris, alors qu'il couchait à Saint-Ouen. Il avait remis le soin de sa sécurité au duc de Berry. Mais celui-ci avait un rendez-vous amoureux avec une danseuse de l'Opéra et donna le commandement de la garde nationale au maréchal Oudinot, lequel avait, lui, rendez-vous, pour la nuit, avec sa femme. Il se déchargea sur le commandant de la garde nationale qui, à son tour, pour un motif analogue, appela un colonel de la ligne, et celui-ci, en cette nuit qui devait être si bien remplie pour l'amour, délégua ses pouvoirs à un capitaine. Voilà qui fait l'éloge de la chaleur de coeur des officiers de l'entourage du roi, sinon de leur scrupuleuse observation à leurs devoirs !
Singuliers retours de la destinée ! Hélène Potocka, cette si vraie grande dame, mourant presque subitement pendant une absence de son mari, fut enterrée avec si peu de pompe, qu'on ne lui acheta même pas une concession, et que ses restes, au bout de quelques années, furent jetés à la fosse commune. Quant au comte, il revint à sa première femme, et il l'épousa de nouveau.
Un des documents curieux de l'étude de M. Pérey consiste dans la reconstitution de la garde-robe d'Hélène Potocka. On ne songeait pas alors au linge de soie noire ! Il y est fait mention de cinquante camisoles de nuit en taffetas blanc, de deux cents paires de bas de soie blanche et cent paires de jarretières pareilles. Voilà d'affriolants détails intimes sur cette belle mondaine d'autrefois.
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